Explorer une nouvelle approche pour l'un des cancers les plus mortels
Le cancer du pancréas demeure un problème complexe à résoudre pour les chercheurs. Les progrès en matière de diagnostic et de traitement de la maladie ont été limités et le cancer du pancréas reste extrêmement difficile à traiter. Il y a deux ans, l'IORC a mis sur pied une initiative multidisciplinaire appelée PanCuRx, qui fait appel à des technologies de pointe pour donner aux patients de nouveaux traitements supérieurs contre le cancer du pancréas. Les découvertes du groupe sont déjà en train de redéfinir notre compréhension du cancer du pancréas et ouvrent de nouvelles voies indispensables pour le traitement, et, de plus, un nouvel essai clinique, l’essai COMPASS, aide à mieux apparier les patients aux traitements.
Au Canada, le taux de survie à cinq ans dans le cas du cancer du pancréas est de seulement huit pour cent, un pourcentage qui n'a pas changé de façon significative depuis des décennies. Quelques facteurs plus importants expliquent le pronostic défavorable que connaissent la plupart des patients atteints de la maladie. Le cancer du pancréas est notoirement difficile à déceler à un stade précoce, là où il est plus facilement guérissable. Il est diagnostiqué le plus souvent à un stade très avancé. De plus, seulement de 15 à 20 pour cent des patients peuvent être opérés, éliminant du coup une avenue de traitement possible pour de nombreux patients. Peu de traitements approuvés existent et ils ne sont efficaces que chez un petit nombre de patients. Également, très peu de traitements de deuxième intention sont disponibles, par conséquent, les patients qui ont une récidive après leur traitement initial ont peu d'options thérapeutiques à leur disposition.
La réflexion qui sous-tend notre approche est que les réponses ne viendront pas d'une seule discipline ou d'une seule équipe, il faut une approche vraiment collaborative. - Dr Steven Gallinger
Depuis avril 2015, PanCuRx travaille à la concrétisation de meilleurs traitements contre le cancer du pancréas. Dirigés par le Dr Steven Gallinger, les chercheurs du programme collaborent à des programmes de l'IORC de mise au point d'outils de diagnostic, de génomique et d'informatique, de pair avec des scientifiques du University Health Network, du Sunnybrook Research Institute et du Mount Sinai Hospital, pour aborder le cancer du pancréas de manière multidisciplinaire.
« Les progrès limités réalisés dans le traitement du cancer du pancréas au cours des dernières décennies montrent jusqu'à quel point cette maladie est complexe du point de vue de la recherche, a déclaré le Dr Gallinger. La réflexion qui sous-tend notre approche est que les réponses ne viendront pas d'une seule discipline ou d'une seule équipe, il faut une approche vraiment collaborative. »
Mieux comprendre la biologie du cancer du pancréas
Parce que les fondements biologiques du cancer du pancréas sont encore mal compris, les chercheurs de PanCuRx ont tenté de mieux définir les caractéristiques sous-jacentes de la maladie. Ce travail a fini par payer au cours de la dernière année, en effet, les chercheurs de PanCuRx ont communiqué des résultats majeurs nouvellement acquis qui enrichissent les connaissances sur le développement et le traitement de ce cancer.
Cette année, les résultats marquants sur l'apparition du cancer du pancréas obtenus par les chercheurs de PanCuRx remettent en question la vision traditionnelle sur le développement de la maladie. Le Dr Gallinger et Faiyaz Notta, docteur en génétique moléculaire, ont séquencé le génome complet de 100 tumeurs pancréatiques et ont découvert que plutôt que d'accumuler des mutations lentement, les modifications génomiques responsables de la maladie se produisent toutes en même temps – les chercheurs ont comparé cette découverte au concept du « Big Bang ». Ces résultats permettent de comprendre pourquoi le cancer du pancréas est si agressif et pourquoi souvent son diagnostic ne s’obtient qu’à un stade avancé. Et, grâce à ces résultats, on a maintenant la chance de pouvoir trouver de meilleures stratégies de traitements.
Nous montrons que la médecine de précision est possible dans le contexte du cancer du pancréas. L'utilisation de technologie comme le séquençage génomique en pratique clinique pour traiter cette maladie permettra d'obtenir de meilleurs résultats - Dr Steven Gallinger
L'équipe de chercheurs a également publié un article sur la découverte de quatre signatures génomiques dans le cancer du pancréas et exploré l'utilisation possible de l'immunothérapie dans le traitement de la maladie. L'une des signatures, soit l'atteinte du système de réparation des mésappariements (MMR), était particulièrement intéressante sur le plan clinique. Bien que cette signature soit présente uniquement dans environ un à deux pour cent des cas de cancer du pancréas, il reste que l'immunothérapie s'est révélée un traitement efficace contre d'autres types de cancers où elle était présente. Étant donné le manque de traitement efficace contre le cancer du pancréas, il s'agit d'une nouvelle encourageante.
« Mieux comprendre comment le cancer apparaît et identifier les signatures génomiques associées à la maladie aideront notre groupe et d'autres chercheurs à concevoir de nouveaux outils diagnostiques et de nouveaux traitements », a déclaré le Dr Gallinger.
Transmettre les connaissances à la pratique clinique
L'initiative PanCuRx vise à transformer les progrès de la recherche en résultats tangibles pour les patients. C’est pourquoi, PanCuRx a lancé un essai clinique appelé COMPASS qui fait le séquençage du génome complet et de l'ARN provenant d'échantillons de patients qui reçoivent une chimiothérapie de première intention standard. Les résultats obtenus sont communiqués à l'oncologue du patient en temps opportun pour l'aider à choisir un traitement de deuxième intention, y compris des traitements expérimentaux qui sont évalués dans le cadre d'autres essais cliniques, si c’est indiqué.
« Grâce à cet essai, nous montrons que la médecine de précision est possible dans le contexte du cancer du pancréas. L'utilisation de technologie comme le séquençage génomique en pratique clinique pour traiter cette maladie permettra d'obtenir de meilleurs résultats, a affirmé le Dr Gallinger. C'est fantastique de pouvoir aider des patients à obtenir des traitements de deuxième intention et d'approfondir nos connaissances sur cette maladie en même temps. »
Jusqu'à maintenant 51 patients admissibles ont accepté de participer à l'essai COMPASS. Neuf patients qui étaient suffisamment en santé pour avoir d'autres traitements ont été jumelés à des thérapies d'après l'information fournie à leur médecin par le biais de l'essai COMPASS et, de ces patients, trois ont reçu des médicaments expérimentaux. Les dirigeants de PanCuRx prévoient étendre l'essai à plus de sites en Ontario.
Surmonter les obstacles et mettre au point des ressources
L'accès à des échantillons de tumeurs pancréatiques pour la recherche est essentiel au succès de PanCuRx. L'équipe est à mettre sur pied un dépôt d'échantillons de tissus qui combinera de l'information clinique, pathologique et moléculaire pour aider les chercheurs à définir les voies biologiques qui stimulent la maladie. Cette information contribuera à l'identification de marqueurs biologiques qui pourront servir à prédire l’apparition du cancer du pancréas et à aider à obtenir un pronostic. Cette réserve d'échantillons de tissus permettra également aux chercheurs d'investiguer de nouvelles molécules cibles pour le traitement et d'identifier des sous-catégories de cancer du pancréas.
Être en mesure de tirer parti du savoir-faire et des technologies de pointe disponibles en Ontario a été inestimable - Dr Steven Gallinger
Par ailleurs, un problème majeur que pose les échantillons de tissus provenant d'un cancer du pancréas disponibles pour les études est qu'ils contiennent souvent peu de cellules – il est donc difficile d'obtenir les cellules cancéreuses essentielles à la recherche. Pour surmonter cet obstacle, PanCuRx a travaillé avec des chercheurs du programme de Développement du diagnostic de l'IORC et du Princess Margaret Cancer Centre, qui recourent à une technologie appelée microdissection par capture laser pour séparer le tissu utile pour la recherche des autres cellules qui interfèrent avec les résultats.
« Être en mesure de tirer parti du savoir-faire et des technologies de pointe disponibles en Ontario a été inestimable, a déclaré le Dr Gallinger. Nous sommes très confiants que notre effort commun se traduira par des résultats et que, ultimement, il viendra en aide aux patients atteints d'un cancer du pancréas. »
PanCuRx a été la première des cinq initiatives de recherche translationnelle (IRT) de l'IORC en cours, quatre autres initiatives ont été lancées en mai 2017. Le succès rapide de PanCuRx a montré que son approche collaborative et multidisciplinaire peut être une façon efficace d'aborder certaines des plus grandes difficultés dans le domaine du cancer. Les nouvelles initiatives de recherche translationnelle de l'IORC tablent sur le succès de PanCuRx, mais ciblent d'autres cancers difficiles à traiter, ce qui fait en sorte que les meilleurs chercheurs de l'Ontario travaillent ensemble pour résoudre certains des problèmes les plus complexes dans le domaine du cancer de nos jours.
Crédit photo : Vanya Peltekova