Ontario Institute for Cancer Research

Rapport annuel 2018/19

Modifier le paysage des essais sur le cancer du poumon

Les particules ou rayons de haute énergie utilisés en radiothérapie sont très efficaces pour tuer les cellules cancéreuses. Cependant, ils posent problème pour les patients, car ces mêmes radiations tuent aussi les cellules saines autour de la tumeur, ce qui cause des effets secondaires graves et limite le traitement. Bien qu’un grand nombre de recherches passionnantes qui visent à améliorer la radiothérapie et à augmenter sa précision soient en cours en Ontario et dans le monde, les essais cliniques nécessaires pour rendre ces nouvelles pratiques et technologies accessibles aux patients peuvent être difficiles à mettre en branle et longs à mener, ce qui restreint les bienfaits qu’ils peuvent procurer aux personnes qui en ont un besoin immédiat et retarde l’adoption de nouveaux traitements.

Dr. David Palma

Dr David Palma

Le Dr David Palma, radio-oncologue au Centre des sciences de la santé de London et clinicien-chercheur à l’IORC, a mis sur pied en 2015 le Canadian Pulmonary Radiotherapy Investigators Group (CAPRI) pour venir à bout du goulot d’étranglement dans le domaine des essais cliniques en radio-oncologie et permettre aux patients d’accéder plus rapidement à davantage de traitements de radiothérapie.

Une nouvelle approche pour permettre aux patients d’accéder aux essais

Il peut être difficile de procéder à un essai de radiothérapie parce que c’est souvent une technologie ou un « un concept thérapeutique » qui fait l’objet de l’évaluation et non un nouveau un produit. « Les chercheurs qui souhaitent mener des essais de radiothérapie ne peuvent pas compter sur l’argent des fabricants pour ce faire, comme c’est le cas lorsqu’il s’agit de nouveaux médicaments ou dispositifs médicaux », explique M. Palma. Un autre facteur dont il faut tenir compte est le fait que ces essais prennent beaucoup de temps. « Il peut souvent s’écouler plus d’une décennie avant que l’essai soit terminé et les résultats, analysés, affirme-t-il. Et à ce moment, les technologies ont encore évolué. »

Le CAPRI adopte une approche en trois volets pour permettre aux patients atteints d’un cancer du poumon d’accéder à un plus grand nombre d’essais cliniques en radiothérapie. Il appuie financièrement jusqu’à cinq essais à la fois, réduit le temps écoulé entre le moment où l’essai est proposé et celui où il est lancé grâce à un processus d’application simplifié et à un échéancier strict et incite les centres de cancérologie de plus petite taille à participer aux essais du CAPRI.

« De plus, comme nous visons à ce que la rédaction du protocole de l’étude soit terminée en moins de trois mois et que l’essai s’ouvre six mois plus tard, nous gagnons un à deux ans avant même que l’essai commence. » - Dr Palma

« En demandant à des spécialistes du traitement du cancer du poumon d’examiner les demandes de subvention, nous n’avons plus besoin de recevoir une présentation de 10 à 15 pages. Leur compréhension de la science sous-jacente signifie que les chercheurs n’ont qu’à présenter un résumé de leur étude, explique M. Palma. « De plus, comme nous visons à ce que la rédaction du protocole de l’étude soit terminée en moins de trois mois et que l’essai s’ouvre six mois plus tard, nous gagnons un à deux ans avant même que l’essai commence. »

Les avantages de la collaboration

Le CAPRI a déjà réussi à rendre davantage de traitements de pointe en radiothérapie accessibles aux patients canadiens atteints d’un cancer du poumon et à améliorer le cadre de ces essais. De plus, grâce à une collaboration avec le programme Imagerie quantitative au service des traitements personnalisés contre le cancer financé par l’IORC, l’ensemble des images, scintigrammes, plans de traitement et autres données cliniques pour les essais du CAPRI sont conservés pour les recherches futures.

« Cette base de données nous permettra d’entreprendre, à partir de ces données, une nouvelle série de recherches pour étudier des sujets comme l’apprentissage machine, l’intelligence artificielle et la radiomique. En analysant les images et les données connexes, nous pourrions prédire les effets toxiques et les résultats thérapeutiques et, au bout du compte, améliorer le traitement », dit M. Palma.

Il y a à peine quelques années, M. Palma ne pouvait que rêver de ce type de base de données parce qu’il n’existait qu’un accès très limité à bon nombre d’images auxquelles des données cliniques étaient corrélées. « Pendant les congrès, mes collègues et moi bavardions et imaginions tout ce que nous pourrions faire avec une telle ressource, avoue-t-il. Il est étonnant de constater à quel point celle-ci s’est intégrée harmonieusement dans les essais du CAPRI. Il s’agit vraiment d’un service prêt à utiliser qui nous permet de traiter nos patients et de faire de la recherche pendant que cette fantastique base de données se construit en coulisse. »

« Je peux vous dire que grâce au CAPRI, le degré de collaboration au Canada en lien avec le cancer du poumon et de la radiothérapie n’a jamais été aussi élevé. » - Dr Palma

Mener le CAPRI plus loin

La base de données du CAPRI n’est pas la seule retombée positive de ces essais cliniques; cette initiative a aussi relancé une collaboration dans le domaine et a inspiré d’autres groupes à adopter le modèle du CAPRI. « Je peux vous dire que grâce au CAPRI, le degré de collaboration au Canada en lien avec le cancer du poumon et de la radiothérapie n’a jamais été aussi élevé, dit M. Palma. Les cliniciens qui participent aux essais font un excellent travail en dirigeant les patients vers d’autres essais du CAPRI qui pourraient leur être bénéfiques, ce qui amène d’autres cliniciens à vouloir faire de même. Nul doute que le CAPRI a eu un effet positif sur la collaboration et sur l’accroissement du nombre de participants aux essais. »

M. Palma affirme que le succès du CAPRI a donné lieu à des initiatives visant à appliquer son modèle simplifié aux essais cliniques sur la radiothérapie dans d’autres types de cancer. On projette de mettre sur pied un groupe similaire au CAPRI pour le cancer de la tête et du cou et l’on souhaite étendre l’utilisation du modèle à divers autres sites de l’organisme. Dans le cadre du congrès annuel de l’Association canadienne de radio-oncologie qui se tiendra en octobre, M. Palma participera à un atelier spécial qui vise à aider ces nouveaux groupes à démarrer.

Cela signifie que les patients atteints d’un autre type de cancer que le cancer du poumon pourraient aussi bénéficier d’un accès plus rapide à davantage d’essais cliniques sur la radiothérapie. « Il a été très satisfaisant de constater les répercussions positives que le CAPRI a eues pour les patients et la recherche sur la radiothérapie dans le cancer du poumon, assure M. Palma, mais pouvoir opérer des changements dans d’autres domaines, c’est l’assurance que nous faisons réellement bouger les choses. »